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Page:Labi 1998.djvu/174

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et dont il a été fait état ci-dessus permet déjà d’en douter. Les estimations fournies soit par les administrateurs eux-mêmes à la fin du 17e siècle soit par les historiens aujourd’hui le confirment. En Provence, l’évaluation des fugitifs présentée par l’intendant s’élevait à un cinquième de la population protestante, soit tout de même 1400 personnes environ. En Dauphiné, d’après la source analogue établie pour cette province, un tiers des huguenots se seraient exilés, soit plus de 20’000 personnes.[21] Ainsi ce serait 20% des protestants provençaux et 30% de ceux du Dauphiné qui auraient fui leur province, malgré toutes les interdictions et toutes les mesures prises pour empêcher l’exil.


CONCLUSION

Nous savons aujourd’hui que la Révocation fut une erreur politique considérable. Elle constitue une excellente illustration de l’écart qui peut s’établir entre la disposition législative et les moyens concrets de la faire appliquer, la disproportion entre la volonté politique et les possibilités administratives.

La vision globalisante de Louis XIV, dans le cas précis de la religion réformée, montre à l’évidence la distance qui s’était instaurée entre le souverain et son peuple. L’une des causes de l’édit de Fontainebleau est, sans aucun doute, la profonde ignorance avec laquelle le souverain et une partie de ses ministres considéraient la religion réformée et son fonctionnement tout autant que la situation concrète des huguenots français.

Elle révèle aussi, une fois de plus car c’est une constante dans le temps long et quels que soient les régimes, qu’une chose est d’édicter la loi, une autre de la faire appliquer. Dans le cas de l’interdiction d’émigrer faite aux protestants français qui nous a occupés ici, non seulement la loi ne devait sans doute pas être appliquée mais, compte tenu des moyens administratifs et techniques de l’époque, elle ne pouvait pas l’être. Ainsi la révocation, vue dans son application à l’espace restreint du monde alpin, fut à la fois certainement une erreur, probablement une faute et, en tout cas, un échec. Quant à la problématique qui nous a occupés ici, ne faut-il pas conclure tout simplement que la frontière ne saurait être étanche?

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AUDISIO: SURVEILLER LES PASSAGES ALPINS