l’envie et les moyens de faire graver des inscriptions. Les plus humbles nous échappent totalement. De plus, les textes épigraphiques sont ordinairement très peu explicites, car, à la différence des soldats qui indiquent couramment leur cité d’origine, les civils immigrés le font très rarement. Pourtant, j’ai pris le parti de ne retenir comme immigrés que les personnages qui ont indiqué leur origine étrangère et ont tenu à affirmer leur spécificité. C’est une attitude très restrictive, peut-être trop, mais il m’a semblé bien délicat de me fonder sur l’étude onomastique qui, en ce domaine, reste beaucoup trop aléatoire, et même sur la tribu des citoyens romains. Non seulement la tribu des populations des Alpes n’est pas connue partout (par exemple dans les Alpes Graies/Atréctiennes), mais l’appartenance à une tribu différente n’implique pas forcément que le personnage est originaire d’une autre région, car il a pu recevoir la citoyenneté romaine à titre individuel et prendre la tribu de son protecteur.
Malgré un dépouillement aussi exhaustif que possible des recueils d’inscriptions et de Y Année Épigraphique, je n’ai réussi à recenser que quatre immigrés, un homme dans la confédération des Voconces, un couple en Tarentaise et un homme dans le Val d’Aoste. Tous étaient citoyens romains.
Quintus Caetronius Titullus
Retiré à Die, où il est mort dans le courant du 2e siècle (mention des dieux Mânes dans son épitaphe), Quintus Caetronius Titullus était probablement un Italien.[23] Engagé volontaire dans la sixième cohorte prétorienne, il servit pendant au moins seize ans dans ce corps d’élite. À sa sortie de l’armée, il se retira d’abord dans la colonie de Rimini, sans doute nanti d’un pécule non négligeable, puisqu’il ne tarda pas à appartenir à l’élite de cette colonie en tant que duumvir et pontife. Puis il émigra dans les Alpes chez les Voconces de Die, où il occupa encore trois fonctions. Préfet du district Epotius, il avait été nommé par les autorités municipales de Die pour administrer ce petit territoire qui pourrait avoir été situé entre la Durance, la montagne de Laup, le Roc de la Sauze et le pic de Ceüze.[24] Il accéda ensuite au prestigieux poste de prêtre du culte impérial municipal avant d’être responsable de l’organisation des jeux publics.
Tiberius Claudius Phoebus et Pilia (?) Fida
Tiberius Claudius Phoebus et sa femme, Pilia (?) Fida, s’étaient installés en Tarentaise, puisque le mari y a fait graver de son vivant sa propre épitaphe